A partir du 31 octobre prochain, les compagnies Le Petit Théâtre de Pain, Artedrama et Dejabu se réunissent à nouveau pour la création d’un spectacle en langue basque, première représentation le 31 octobre à Louhossoa, Salle Harri Xuri, avant une tournée de plus de 40 représentations en Euskal Herri.
Comme ce fut le cas en 2011 avec la pièce Errautsak (2010) puis avec Hamlet (2013), c’est depuis leur camp de base de la fabrique d’arts de rue Hameka, à Louhossoa, que le Petit Théâtre de Pain, Artedrama et Dejabu Panpon Laborategia renouvellent leurs désirs d’une création théâtrale pensée, conçue et jouée en basque, Francoren Bilobari Gutuna (« Lettre à la petite-fille de Franco »).
Avec le soutien de l’Institut Culturel basque Eke et d’une dizaine d’opérateurs d’arts vivants comme Biarritz Culture, la motivation politique est clairement assumée, comme une évidence, le metteur en scène Ximun Fuchs ayant pris le temps face à la presse de renouveler ce besoin d’une matière théâtrale propre à cette culture, qui se verra déployée sur une quarantaine de dates déjà fixées en Pays basque nord :
- la première aura lieu le 31 octobre à Louhossoa) et en Pays basque sud (5 dates à Donostia du 9 au 13 novembre, ou celle, très attendue, le 13 janvier 2017, à Gernika, l’année du 80ème anniversaire du bombardement de la ville par les franquistes).
La toile de fond de cette Lettre prendra l’aspect d’un hôpital pas plus rassuré sur son avenir que ne le sont les patients, dont les corps souffrent de traumatismes dans lesquels s’entrechoquent le passé et le présent.
Radiographie traumatologique d’une Espagne qui, cas unique en Europe, contraint toujours les recherches des desaparecidos et n’a organisé aucun procès des responsables de la dictature franquiste, Francoren Bilobari Gutuna s’enracine sur cette lettre du philosophe juif allemand Günther Anders, compagnon de Hannah Arendt et Brecht, qui écrivit « Nous, fils d’Eichmann », adressé au fils de l’administrateur nazi chargé de la déportation et de l’extermination des juifs, jugé et pendu à Jérusalem en 1962.
Le contexte n’est pas le même, le symbole reste à la fois cette demande faite à son fils de se démarquer de son père et de se jeter corps et âme dans la lutte contre le révisionnisme, mais également de reprendre ici en Pays basque le combat pour retrouver la mémoire d’un peuple.
« Le nazisme a eu son procès, à Nuremberg, à Jérusalem ou Lyon ; le franquisme, non. Car la loi l’interdit », précise Ximun Fuchs, « sous couvert d’amnistie, le vivre ensemble n’est garanti que par l’amnésie », a complété celui dont les deux grands pères ont connu les camps, « l’un parce qu’il était juif, l’autre parce qu’il était basque ».
S’appuyant sur cette conviction que le théâtre a souvent utilisé le procès pour mettre en lumière les conflits et les enjeux de son temps, cette lettre s’adresse à une population bascophone pour qui il sera toujours impossible de considérer Franco comme une simple marionnette du passé.
« Son héritage est toujours présent, nous voulons rendre à la petite-fille de Franco cet héritage avec une force toute poétique. car ce qu’ils nous ont volé dans le sang, la peur et la torture, il est clair qu’ils ne nous le rendront jamais ».
Tous les renseignements sur le site dédié www.franco.eus
Premières dates de représentations
OCTOBRE
31 LOUHOSSOA
NOVEMBRE
2 VITORIA-GASTEIZ
4 AZPEITIA
9 DONOSTIA
10 DONOSTIA
11 DONOSTIA
12 DONOSTIA
13 DONOSTIA
17 BILBAO
18 LEIOA
19 ST JEAN PIED DE PORT
26 LARRESORE
DÉCEMBRE
1 PAMPELUNE
3 ST PÉE SUR NIVELLE
4 FONTARRABIE
6 DURANGO
9 SOPELA
11 MARKINA-XEMEIN
16 ZUMAIA
17 OTXANDIO
18 ATAUN
Complément de lecture :
La place de la langue basque dans le théâtre, des deux côtés des Pyrénées,
dossier analyse par Frederik Verbeke, Eklektika décembre 2015
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